Sortons le Grand Jeu ! Pour ce 5ème épisode, Cyrus et Le Pionfesseur nous renvoient toujours plus loin en arrière, destination 1981 pour parler de Sherlock Holmes Detective Conseil ! Pour le coup, il y a peu de chance que vous ayez découvert ce jeu dans les premières années de votre passion ludique, encore que cela dépend de l’année à laquelle vous avez commencé, car la vie de ce jeu a été particulièrement mouvementée.
Et cette fois, ce n’est pas d’un seul auteur dont il est question mais de trois, mais vous allez voir qu’il est malheureusement bien difficile de trouver des informations sur ces auteurs compte tenu, vraisemblablement, de la précocité de leur création et de la discrétion de ceux-ci.
C’est donc un épisode avec des faits, toujours, mais aussi avec beaucoup de suppositions que nous vous offrons.
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Commentaires précédents
Les commentaires de l’épisode précédent, c’est par ici, mais comme d’habitude, nous résumons le tout 🙂
Sherlock Holmes Detective Conseil, c’est quoi ?
Avant tout, intimes que nous sommes, nous appellerons Sherlock Holmes Detective Conseil : « SHDC ».
Un jeu de Raymond Edwards, Suzanne Goldberg et Gary Grady édité en 1981 chez Sleuth Publications (localisé par Descartes), puis par Ystari puis par Space Cowboys en France. Illustré, dans le désordre, par Bernard Bittler (Descartes ?), Arnaud Demaegd (Ystari), Nils Gulliksson (Sleuth ?), Nériac (Ystari), Pascal Quidault (Space Cowboys), Stefan Thulin (Sleuth ?). Un jeu pour 1 à 8 joueurs, conseillé à partir de 10 ans qui vous emmènera dans des parties de 60 à 120 minutes (mouais…).
SHDC est un jeu d’enquête sous la forme d’une sorte de livre dont vous êtes le héros. Les joueurs sont invités à naviguer de paragraphes en paragraphes pour essayer de résoudre une enquête. Chaque paragraphe constitue une piste. Le but est d’utiliser le moins de pistes possible pour résoudre l’enquête, sachant qu’aucun paragraphe ne révèle l’ensemble de la solution et que les joueurs peuvent s’arrêter dès qu’ils le souhaitent pour se rendre à la fin du livret de jeu et répondre à un ensemble de questions.
Pourquoi SHDC est un grand jeu ?
Les prix :
- 1982 – Charles S. Roberts
- 1985 – Spiel des Jahres
- 2012 – As d’Or – Jeu de l’Année – prix spécial du jury (!)
Classement BoardGameGeek : une évolution atypique
- 2010 : ~450ème
- 2011 : ~450ème
- 2012 : ~400ème
- 2014 : ~150ème
- 2015 : ~150ème
- Aujourd’hui : 68ème
Une édition en 3 temps ou « le jeu Phénix » !
Des extensions :
- Nous vous renvoyons vers le dossier de Stéphane Anquetil réalisé pour Proxi-Jeux pour voir ce qui était sorti en 2014.
Des adaptations numériques…
L’analyse
- D&D / Tunnels and Trolls ou le jeu de rôle…
- Les livres dont vous êtes le héros : oui et non…
- Jeux narratifs en général
- Tales of the Arabian Nights par exemple
- En particulier :
- Détective (Przemysław Rymer, Ignacy Trzewiczek, Jakub Łapot – Portal Games / Iello) : une version 2.0 de SHDC
- Chronicle of Crimes (David Cicurel – Lucky Duck Games) avec l’ajout du changement d’état des protagonistes ; suivre deux fois une même piste devient possible
- Q-system : une version plus vive (Francisco Gallego Arredondo, Martí Lucas Feliu, Josep Izquierdo Sánchez – GDM Games / Geek Attitude Games)
- Watson & Holmes (Jesús Torres Castro – Ludonova / Space Cowboys) : la version compétitive
Pour faire écho à la chronique d’Acariâtre dans les chroniques n°100, nous tentons de confronter notre sujet au modèle du genre littéraire décrit en 3 étapes par Alastair Fowler : œuvre innovatrice, l’œuvre paradigmatique et l’œuvre définitive.
Le thème est un élément central dans ce jeu au point qu’il dirige, au moins en partie, la mécanique pour coller avec l’époque dans laquelle le jeu s’inscrit.
Les auteurs – R. Edwards, S. Goldberg et G. Grady
Une histoire façon Jacques Pradel (Perdu de vue, ça ne vous dit rien ?)
Suzanne Goldberg et Gary Grady :
- Gumshoe, the Hardboiled Detective in the Thirties – avec uniquement Gary Grady dans les crédits.
- Nouvelle œuvre éditée en 1995 pour Gary M Grady et Suzanne Goldberg chez Gamescape Publications : “Darts” 😀
- Suzanne Goldberg est à nouveau éditée en 1996 avec un co-auteur : Robert Hamilton : “Backgammon” (non non, toujours pas un jeu… Cliquez sur le lien 🙂 )
Raymond Edwards
Raymond Edwards comptera quant à lui un seul autre jeu :
- 1985 – Silk road (édition japonaise uniquement – un jeu de PickUp and delivery)
- Et si on remonte plus tôt, on trouve peut-être des ouvrages sur les échecs dans les années 70 et 80 ??? Mais on est peut-être sur un homonyme… https://www.amazon.co.uk/l/B001HPM5OQ
Des auteurs par accident !???
Quelques anecdotes
- A propos de la réédition :
- C’est Yannick Mescam qui a beaucoup travaillé sur la réédition Ystari
- Gros travail de réécriture car certaines enquêtes ont vieilli et étaient devenues trop faciles pour le public d’aujourd’hui
- Renouveau graphique et des illustrations plus noires et moins cliché
- Tom Lehmann est là quelque part… (quel homme !)
- Un Spiel des Jahres parmi ceux qui se sont le moins bien vendu
Concluons
Notre avis sur le jeu. À votre avis ?
C’est la fin
Nos sources
Le jeu
- Wikipedia : l’inévitable
- L’histoire de la réédition : article de White Flag et interview de Yannick Mescam sur Les sentiers De l’Imaginaire
- Comment ça marche un scénario : Interview de Stéphane Anquetil par Acariâtre
- La technique par Boardgamegeek : Fiche du jeu
- Retour vers le futur : https://archive.org/
Les auteurs
- L’histoire racontée pas le Dr Mops : article
- Google et la dextérité de Cyrus à taper les noms des auteurs et à trouver des pages improbables dont les liens sont plus haut dans le billet
Et le reste, les approximations, les tentatives d’explications et les suppositions foireuses vous sont offertes par vos deux hôtes 😜
Bizarre de tout le temps conseiller Podcast Addict a tout le monde alors que cela ne s’adresse qu’aux utilisateurs de Android. pour tous les autre qui utilisent un bon OS mobile on peut conseiller Castro, Instacast ou d’autres. C’est vrai que le choix est plus vaste 😉
Salut Alexgodlex !
Oui, nous recommandons podcast addict car l’application met à disposition un menu dynamique qui permet d’accéder directement à la rubrique souhaitée. Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas penché sur les applications de podcast iOS, faut dire que c’est un peu trusté par l’app native. Mais du coup j’ai regardé les 2 app dont tu parles, mais dommage elles ne mettent pas cette fonctionnalité à disposition ♂️ elles sont sûrement très sympa en dehors de ça
Cyrus
Sympa l’épisode ! Quand vous citez les jeux d’enquetes compétitifs je pense que vous oubliez « minuit meurtre en mer » qui reprend vraiment le même type de schéma avec un livret et des paragraphes 🙂
Effectivement, nous l’avons bien zappé celui-là, mais bon, l’idée n’est pas de lister non plus tous les descendants, mais plutôt quelques uns qui reprennent l’essence même et certains qui viennent twister le jeu dont on parle, voire faire évoluer le concept.
J’avoue n’avoir jamais joué à Minuit Meurtre en mer, ce n’est pas l’envie qui manque. Est-ce que ça fait évoluer le concept de SHDC selon toi ? Comment est-ce que ça le « twiste » ?
Eh beh il aura fallu l’épisode suivant pour que je revienne répondre !
Alors bien sûr je suis d’accord qu’il faut pas tomber dans le « name drop » de jeux, simplement il me semble de mémoire que vous parlez d’un jeu à un moment comme étant le seul jeu d’enquête narrative en mode compétitif.
Alors que justement ça fait partie des twist de MMM, c’est un compétitif ! Ça implique des blocages, des systèmes de points d’action… Et que tout le monde n’a pas les mêmes informations, donc de l’intox, du bluff, on fait croire que tel personnage a une information capitale à donner pour faire perdre du temps aux autres. Un peu le genre de sentiments qu’on peut avoir dans « L’île au trésor ».
Les autres twists à mon sens : la « carte » est représenté sur un plateau central et les joueurs doivent se déplacer dessus pour récolter des indices. Il y a aussi (et c’est pas le meilleur twist selon moi) des jets de dés un peu à la manière du jeu de rôle pour savoir si on réussi ou non nos interrogatoires. On peut dépenser plus de points d’action pour être sur de réussir l’interrogatoire (mais bon difficile de gagner comme ça). Il y a aussi quelques événements qui vont arriver aléatoirement, bouger les personnages ou précipiter la résolution.
Tout le système s’adapte aux différentes enquêtes qui ont toutes le même système de jeu/décors (un bateau de croisière).
Merci beaucoup d’être venu apporter ces précisions Robin !
Oui, possible qu’on ait dit que Watson & Holmes était le seul compétitif dans ce genre à notre connaissance. Et maintenant que tu l’écris, je me rappelle qu’on m’avait fait les mêmes remarques que toi sur MMM. Donc j’aurais dû le savoir, mais la mémoire… 😀
Et effectivement, le coup des jets de dés, c’est sans doute pas la meilleure idée du jeu ^^’
Excellent jeu et excellent épisode, on ne voit pas le temps passer à vous écouter en parler !
Quelques réflexions totalement pêle-mêle venues en cours d’écoute :
– Toujours surprenant et triste de voir qu’en ce qui concerne l’ère pré-Internet, les sources d’informations sur la création du jeu sont aussi inexistantes ou inaccessibles. Un peu « dangereux » de faire des suppositions à ce sujet même si c’est très tentant !
– Dans la forme SHDC aurait très bien pu être un Livre dont vous êtes le héros. La différence principale que vous soulignez est la non-linéarité du parcours des paragraphes (+ le multi-joueuses) mais est-elle suffisante ? Autrement dit, SHDC n’est-il pas un jeu plus qu’un LDVELH que parce que ses auteurs en ont décidé ainsi ?
– Cette non-linéarité a une conséquence que je trouve dérangeante (à première vue !) qui est l’absence de paragraphe de conclusion. C’est aux joueuses, laissées à elles-mêmes, de décider quand elles considèrent en savoir assez. Cela a créé des moments de flou et d’enlisement lors de mes propres premières parties.
– Dans mes parties, le plan de Londres est assez sous-exploité (beaucoup moins vrai avec la campagne Carlton House). On aurait pu imaginer un plateau qui aurait au moins par exemple matérialisé le groupe d’enquêtrices, le lieu du meurtre mais on reste dans du pur document, du pur littéraire.
– Dans la filiation des Livres dont vous êtes le héros, je me demande si beaucoup de gens jouent seuls à SHDC…
– Vous passez un peu vite à mon goût sur les différences de création que nécessitent un jeu de ce genre. Il faut en effet un sens du scénario et de l’écriture qui s’éloignent des compétences habituelles du game design. Pour Detective les postes sont d’ailleurs distingués (scénario / adaptation en paragraphes / game design).
– L’aspect très littéraire et le multi-joueuses introduise des phases de lecture de textes longs qui sont rares dans le jeu de société. Une autre singularité du jeu qui peut déranger quand on s’y frotte.
– Vous invoquer Alastair Fowler pour parler du rythme d’émergence d’un genre mais sans avoir réellement circonscrit le genre dont vous parlez !? S’agit-il du « jeu d’enquêtes », « du jeu à scénarios », « du jeu dont vous êtes les lecteurs ». Il manque une étiquette explicite et reconnue des (rares) jeux qui se sont inscrits dans la filiation de cet Objet Ludique Non Identifié !
Salut,
Coïncidence ou complot, je viens de voir une conférence (sur le jeu lié au domaine académique) qui citait, en introduction, les livres dont vous êtes le héros et le premier livre jeu, qui selon ce conférencier, serait:
Treasure Hunt de Alan George (1940)
J’ai entendu parler du jeu « Mythos Tales », sorti en 2016 via une campagne Kickstarter, via un podcast américain et je me souviens avoir été très surpris de la similarité avec SHDC. En fait, il s’agit peu ou prou d’une version de SHDC se passant à Arkham dans l’univers de H.P. Lovecraft, mais reprenant très exactement les mêmes mécaniques avec des ajouts (mineurs ?) — la possibilité de ne pas pouvoir finir une enquête parce qu’on est devenu fou, des cartes numérotées que l’on peut acquérir dans certains lieux et qui représentent des indices, des artefacts, qui nous ouvrent des portes plus tard pendant l’enquête si on les possède. Sans vouloir retomber dans l’éternel débat, je me suis demandé en écoutant la description du jeu où était la frontière entre hommage et plagiat, et jusqu’à quel point un système de jeu peut-être considéré comme la propriété de ses auteurs originaux. Bref. Le jeu n’est disponible qu’en anglais et allemand, apparemment Pegasus Spiele a localisé le jeu l’an dernier. Dans un registre très proche, il existe aussi « Martian Investigations », qui je crois est auto-édité, et qui transpose le système de SHDC dans un contexte de science-fiction, au milieu d’une colonie martienne. Ma foi, pourquoi pas ! Je précise que je n’ai joué à aucun de ces deux jeux. Par contre votre chronique m’a clairement redonné l’envie de ressortir ma boite de SHDC, qui a encore quelques enquêtes non résolues ! Vivement la prochaine saison de « Sortons le Grand Jeu », j’aime toujours autant ce format.
Bravo pour cette très bonne émission, bien construite…
un oubli pour la filiation directe je rejoins RobinD qui cite MMM , au même niveau que Détective dans sa proximité généalogique . WITNESS peut être également dans le style livre-jeu / Enquêtes / expérience unique.
Pour le coup, je ne mettrais pas Witness dans la même catégorie, parce qu’il relève plus du casse-tête multi-joueur que de l’enquête à mon sens
Encore un très bonne émission ! Votre duo fonctionne vraiment bien. On sent la complicité de ces deux techniciens du jeu et le travail de préparation accompli. Tout cela restitué avec une décontraction et une passion communicative.
Merci pour ces gentils compliments
PS : puisque lepionfesseur en parle à un moment… Afin de mieux connaître nos gentils intervenants et de mettre en perspective vos avis sur les jeux évoqués , la publication de vos top 10 respectifs serait très instructive !!! (Applicable aux autres podcast d’ailleurs)
Très bon choix, et bon tour du propriétaire.
On compte sur vous la saison prochaine, d’autant qu’il y a encore pas mal de Grands Jeux à sortir.
PS > j’ai bien aimé l’innovation du Pionfesseur avec le « Call of the new », qui doit se trouver quelque part entre « Call of Cthulhu » et « Cult of the new » 😉
Eh bien, on n’a pas encore tout à fait les 50 commentaires, mais on s’en rapproche
Excellent épisode, bravo à vous 2
Dans les jeux d’enquête compétitifs on peut évoquer « Orient-Express » un jeu de 1986 édité par Jumbo qui est la source d’inspiration de « Minuit, meurtre en mer » cité par RobinD.
Il y a aussi les BD dont vous êtes le héros éditées par Makaka qui reprennent justement l’univers holmésien et toute la palanquée de LDVELH prenant SH comme personnage principal (je tiens une liste à disposition si besoin, et oui je fais des listes de tout).
Oui, bien sûr, pas mal de choses dont on n’a pas parlé, il faut faire des choix. Mais on note Orient-Express qui nous avait bel et bien échappé !
Petit commentaire suite à l’odieux chantage pour que cette (excellente) chronique continue l’année prochaine 🙂
Concernant SHDC je fais parti de ces joueurs qui jouent sans compter les points. Pour ma part le plaisir de démêler l’enquête et réussir à répondre aux questions me suffit. Mais c’est vrai que du coup on a peut-être moins de pression sur les pistes à suivre. En même temps c’est déjà assez dur comme ça 😀
Comme quoi ça fonctionne 😉
Merci de ton commentaire et de ton témoignage
Par contre, si pour la prochaine saison, on pouvait arrêter la bande-sonore venue d’un porno triste des années 1970…
La guerre des moutons est en vente dans le réseau des Cultura / Jouéclub / etc. Il faut croire que ça se vend encore très bien !
Ha ben moi j’adore justement la musique de cette chronique
Voilà ta soi-disante musique de porno triste Tuin :p
https://www.youtube.com/watch?v=IqHN4AdNOoo
Et merci RobinD d’avoir du goût, toi 😉
Hallo Gunther, je crois que mon évier est encore bouché !
Pas de panick, fraulein, j’ai mon gros outil !
L’ambiance, la qualité de production, l’originalité , la rédaction, les tropes des années victoriennes… Un vrai grand jeu, un vrai top 10 de tous les temps 🙂
La petite histoire veut que Yannick et les fanas de Joc’Ere et du Kalbarj entretenaient la flamme de SHDC jusqu’à redonner l’envie à une nouvelle génération d’éditer ce monument… Encore une dette de la planète ludique à la hype toulousaine 😉
Chocolatine rules!