En 1994, Amigo édite Intrige dans sa version allemande, un jeu de Stefan Dorra. Le jeu sera renommé Intrigue (avec un « u ») plus tard et repris en 2016 par Igiari. Au fil des années, ce jeu de négociation s’est forgé une solide réputation de « jeu d’enfoiré ». A tel point qu’il est devenu emblématique du genre.
Dans ce nouvel épisode de Sortons le Grand jeu, Cyrus et Le Pionfesseur décortiquent le jeu Intrigue, l’occasion de parler d’une dynamique de jeu : la négociation, et de Stefan Dorra.
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Introduction
Commentaires précédents
On revient sur les quelques commentaires de l’émission précédente qui était consacrée à Alhambra et Dirk Henn. Vous pouvez retrouver ces commentaires ici.
Intrigue, c’est quoi ?
Intrigue est un jeu créé en 1994 par Stefan Dorra et illustré par Eckhard Freytag et Markus Wagner pour la version originale et par Clément Masson et Ian Parovel pour la version française. Il se joue de 3 à 5, dès 14 ans. Les parties durent environ 45 min. Le jeu a été édité à l’origine par Amigo et par Igiari (bien plus tard) en français.
Le jeu n’est pas disponible à la Caverne du Gobelin au moment où nous écrivons ces lignes, mais on le trouve toujours.
- À chaque tour on envoie des conseillers chez les autres joueurs ;
- Ces conseillers rapportent de l’argent à chaque tour, MAIS :
- Ce sont les adversaires qui décident sur quel emplacement ils positionnent le conseiller, chez eux (évidemment chaque emplacement apporte un revenu différent) ;
- Chaque joueur et joueuse ne peut accueillir qu’un seul conseiller de chaque type ;
- Dans le cas où un joueur viendrait proposer les services d’un conseiller d’un type déjà présent chez une joueuse, celle-ci choisira entre celui déjà présent et le nouveau prétendant. On peut donc avoir un conseiller qui prend la place d’un autre ;
- Pour négocier, on peut s’échanger des pots-de-vin, avec l’argent que l’on gagne, qui représente aussi les points de victoire…
Pourquoi Intrigue est un grand jeu ?
Les prix :
- 1994 – 4ème au Deutscher Spiele Preis (Allemagne)
Les classements :
Sur Boardgamegeek : 3108ème et 1458ème dans la catégorie « Strategy ».
Pour point de comparaison, il était environ 800ème en 2010.
Les éditions :
- 1994 uniquement des versions en allemand et en anglais
- Il aurait été distribué par Gigamic en France avec une règle en français, après la réédition de 2003 par Amigo.
- 2016 version française par Igiari (1er jeu édité par cet éditeur)
- 2017 – Version japonaise
- 2017 – Version italienne
- 2019 – Version coréenne
Autres :
- Un portage sur BrettSpielWelt
- C’est le jeu dont les ventes ont permis de lancer et d’entretenir Igiari pendant quelques années.
Bon OK, c’est pas vraiment ça qui montre que le jeu est important… Place à l’analyse, alors !
L’analyse
- Négociation
- Les Analyses du Pionfesseur sur la négocation :
- La négociation = quand une interaction dans un jeu compétitif implique une augmentation de valeurs pour les 2 (ou plus) joueurs qui négocient
- Ce sont des échanges “gagnant-gagnant”
- Il faut donc une asymétrie de valeurs entre les joueurs (un élément à plus de valeur chez quelqu’un que chez un autre)
- Le plus souvent parce qu’on fait des collections d’éléments
- Ou parce que c’est caché, qu’il y a du hasard ou que c’est en temps réel
- On peut distinguer les jeux selon la manière dont les promesses sont traitées dans le jeu
- Soit elles n’engagent à rien
- Jeux d’enfoirés !
- C’est là qu’Intrigue se situe
- Soit elles engagent dans le tour ou l’action en cours
- Mais en terme de dynamique on peut en distinguer deux :
- Ceux où ça n’engage que sur l’action parce qu’il n’y a rien d’autre à faire dans le jeu (jeux d’échanges)
- Ceux où ça n’engage que sur l’action mais on négocie souvent des choses sur le long terme (potentielles trahisons) (jeux d’alliances)
- Mais en terme de dynamique on peut en distinguer deux :
- Soit elles engagent sur plusieurs tours
- Soit elles n’engagent à rien
- On peut aussi distinguer les jeux selon la liberté d’échange
- Soit il n’y a qu’un élément qui peut être échangé
- Soit plusieurs
- Dans Intrigue on peut s’échanger l’argent et les places dans le château
- Jusqu’au cas extrême où tout est négociable dans le jeu
- BGG possède un tag “bribery”
- Ce serait les jeux dans lesquels on paie un adversaire pour avoir le droit de faire une action
- Système de revenu
Ce ne sont pas des jeux de négociation :
- Les jeux à marché (Haute Tension, Cuba, Glen More …)
- On fait bien des échanges indirects mais il n’y a pas de négociation entre les joueurs
- Le simple fait de négocier ne suffit pas, il faut que ce soit le cœur du jeu
- En fait, n’importe quel jeu à 3 joueurs serait un jeu de négociation sinon
Mouif
- Pit (1903 – Edgar Cayce, Harry Gavitt et George S. Parker)
- Diplomacy (1959 – Allan B. Calhamer)
- Haggle (1963 – Robert Billingsley et Sid Sackson)
- Origins of World War I (1969 – Jim Dunnigan)
- Rencontre Cosmique (1977 – Bill Eberle, Jack Kittredge, Bill Norton et Peter Olotka)
- Junta (1979 – Eric Goldberg, Ben Grossman, Steve Marsh, Steven Marsh, Vincent Tsao et Nikola Vrtis)
- Res Publica Romana (1990 – Richard Berthold, Don Greenwood et Robert Haines)
- Quo Vadis? (1992 – Reiner Knizia)
- Sauve qui Peut (1993 – Ronald Wettering)
- C’est moi le Patron ! (1994 – Sid Sackson)
- Vampire: The Eternal Struggle (1994 – Richard Garfield, Robert Goudie et L. Scott Johnson)
- Catane (1995 – Klaus Teuber)
- Bohnanza (1997 – Uwe Rosenberg)
- Chinatown (1999 – Karsten Hartwig)
- Genoa (2001 – Rüdiger Dorn)
- L’Or des Dragons (2001 – Bruno Faidutti)
- City of Horror (2005 – Nicolas Normandon)
- Sheriff of Nottingham (2014 – Sérgio Halaban et André Zatz)
- Sideral Confluence (2017 – TauCeti Deichmann)
- Le Dilemme du Roi (2019 – Hjalmar Hach et Lorenzo Silva)
Par où tout à commencer ?
Quel nom est sur toutes les lèvres ?
C’est quoi le meilleur ?
L’auteur – Stefan Dorra
Sa biographie
Stefan H. Dorra est né le 30 juillet 1958 à Soltau. Il a étudié la pédagogie du langage à Hanovre et a travaillé de nombreuses années comme orthophoniste dans une école spécialisée avec des élèves handicapés physiques. Il a d’abord développé des jeux éducatifs pour rendre sa thérapie du langage plus ludique. Par la suite, il a développé de jeu de société “classique”. Il a fait pas mal de co-autorat avec Ralf zur Linde (allemand) et Manfred Reindl (autrichien). Aujourd’hui, il vit près de Hildesheim.
Sa ludographie
- Une soixantaine de jeux
- Razzia, son 1er jeu a été recommandé au SdJ 1992
- For Sale (1997)
- Un Mouton à la Mer (1997)
- Njet (1997)
- Riffifi (2000)
- Medina (2001) (une seconde édition en 2014)
- Alles im Eimer (2002) / Le Roi des Seaux (2018)
- Eselsbrücke (2011 – avec Ralf zur Linde)
Sa patte
- Il y a quelque chose d’assez agressif, sans que ce soit toujours frontal, dans ses jeux
- Des jeux globalement minimalistes (à la Colovini)
- Souvent des twists sur des concepts de jeux existants
- Notamment beaucoup de jeux de cartes et notamment des jeux de plis
Anecdotes
Concluons
Voilà, c’est (déjà) terminé, mais on se retrouve dans 2 mois pour un autre épisode, un autre jeu important et son auteur ou autrice !
Nos Sources
Le jeu :
- Sa fiche BGG
- Vu par Stefan Dorra sich selbst
- Sa fiche sur L’escale à Jeux
L’auteur :
- Sa fiche BGG
- Son site Internet
- Sa fiche Wikipedia
- Sa présentation sur le site de Schmidt Spiele
- Interview publiée en 2005
- Interview publiée en décembre 2015
Et bien sûr nos propres réflexions et autres analyses !
Antiquity c’était du deuxième degré !
Les ascendants et descendants ne sont pas mis à jour dans la fiche !
Je ne vois pas de quoi tu parles…
(C’est donc pour ça que la rédaction m’a paru si courte cette fois X-D ! Merci !)
Sauve qui peu = Rette Sich Wer Kann …. Pas survive !
https://boardgamegeek.com/boardgame/249/lifeboats
https://www.hall9000.de/html/spiel/rette_sich_wer_kann
Bonjour Laurent,
Ce n’est pas ce que j’ai dit. J’ai dit que le partage des barques fait penser à Survive 😉
Cyrus
Comment connaître l’âge secret du Pionfesseur ?
Réponse : Il a dit « Wakatepe » !
Sur 4 parties d’intrigue ce n’est jamais celui ou celle qu’on pensait qui a gagné. Je pense que c’est une fausse impression le calculatoire et il vaut mieux y aller a l’instinct. Par contre je confirme que c’est un des jeux les plus méchants que j’ai joué, beaucoup de couple n’ont pas intérêt à s’y frotter…
Un grand merci une nouvelle fois.
Ma culture ludique s’améliore à chaque épisode 🙂
Petite réflexion tout de même sur « le point Acariatre »
Vu le concept de l’émission, le jeu présenté ne devrait il pas être systématiquement soit l’œuvre innovatrice soit l’œuvre paradigmatique ?
Episode très intéressant, merci ! Je connais mal les jeux de négociations, je suis mauvaise dans l’exercice et devient donc une joueuse « boulet » qui déséquilibre la partie. Je trouve donc ici une liste de jeux » à éviter » ? Une exception : Je me suis interrogée après l’émission sur le dilemme du roi : campagne sensationnelle pour ma part , avec un groupe de joueurs fixe, qui a été menée jusqu’à son terme. Je crois que le côté roleplay m’a permis de m’affranchir d’une sorte de blocage qui s’installe habituellement lors des jeux de négo.
Hello, belle émission comme d’hab!
Je ne sais pas si vous avez déjà joué à Bootleggers, un jeu d’enfoirés pendant la prohibition?
Ça pourrait vous intéresser, il y a une phase de négociation très libre où tout peut s’échanger, avec des accords possibles sur du long terme (sans engagement). Cette phase joliment mis en scène intervient entre une phase où on produit de l’alcool, et celle où on le livre. Certains ont des places libres dans leurs camions, d’autres des caisses en rab à livrer.
Ce qui vient épicer un peu plus cette phase, c’est que les joueurs disposent de cartes pour la plupart assez violentes, la menace fait clairement partie du jeu.
C’est un exemple pour moi en termes d’immersion, dans lequel les sensations de jeu nous plongent dans le rôle de malfrats : faire peur, ne pas céder, ne pas montrer sa faiblesse, faire semblant d’être magnanime sur des coups où l’on est soi-même gagnant…
Bel exemple de jeu de négociation selon moi.
Hej,
Troisième SLGJ pour moi : vous m’avez accompagné avec bonheur dans la Meseta avec cet Intrigue. Quand j’ai vu le nom du jeu, j’ai dit à ma compagne (avant qu’elle ne sieste) : oh chouette, ils vont parler des jeux d’enfoirés .. et bien non, c’était la négociation, et vous aviez parfaitement raison, et c’était encore une très bonne émission.
Et je me suis dit alors que, très bien, ils feront un jour un SLGJ sur les jeux d’enfoirés (avec les jeux de votes – Sauve qui peut (le plus méchant de tous), Zombies, Cash&Guns – ou les jeux de tueurs – Canardage, Wanted/Bang, Services Compris, voire les loups Garou (vous l’avez déjà fait, mais pas pour cette thématique). Mais j’ai vu que vous avez mis certains de ces jeux dans la branche des jeux de négociation, c’est un peu dommage. Je trouve que ce n’est pas forcément les mêmes sensations que les jeux de négociation. C’est que je les aime bien, ces jeux d’enfoirés 🙂
Aussi, mon jeu définitif est Bohnanza. J’adore ce jeu quand les joueurs autour de la table commencent à vraiment négocier, à se faire des cadeaux, des crasses, à argumenter pourquoi il faut prendre le Harry Colique, parce que c’est bon le Harry Colique, et en plus le Harry Cochet, franchement, t’en as pas besoin, tu peux me le donner.
Je n’en ai pas fait que des bonnes, mais j’ai au moins 3 parties de Bohnanza que j’arrive à placer dans mes souvenirs, tellement c’était bon, et je me souviens de mes compagnons de négoces.
Concernant Stefan Dorra, j’ai deux autres jeux à lui dans ma ludothèque, que j’estime fortement :
– Les 7 Sceaux, je ne pense pas que vous en ayez parlé : c’est un jeu de pli (de type tarot), avec le twist de devoir annoncer le nombre (et la couleur) des plis que l’on va produire. Quand on y joue bien, on peut vraiment faire du mal à ses adversaires, ce qui est assez rare dans un jeu de pli. Ca confirme ce que disait Cyrus concernant les jeux qui sont sans pitié chez Dorra.
– Linie 1 : c’est un jeu laid, pose de tuiles pour créer un parcours de tramway : rien de bien transcendant, un peu genre LADR mais en moins bien .. sauf qu’il y a un twist génial : quand un joueur pense qu’il a terminé son trajet, il va l’emprunter pour de vrai avec un tramway, en lançant des dés, pas pour vérifier si le trajet est viable, non ça c’est déjà vu, et pendant ce temps là, les autres joueurs peuvent continuer à construire leurs lignes. Ce jeu de pose se termine donc avec une course de dés (jeu de l’oie) où on ne maîtrise plus rien, et où on espère que notre trajet était optimal. C’est une sensation de jeu géniale ! Pas loin d’être dans mon top 10 !
Enfin, je vais conclure ce pavé par une anecdote :
Trois quatre années de suite, aux 24h du jeu de Saint Leu la Forêt,, on a pris une habitude : c’est lancer un Intrigue au petit matin, après une nuit de non-sommeil. On se marrait bien.
Super épisode comme toujours. C’est vraiment mon format préféré et je vous remercie pour votre travail !
Concernant les jeux de négociations, c’est quelque chose d’absent de ma culture ludique mais vous m’avez clairement donné envie d’essayer quelques titres
Aussi pour revenir sur les commentaires de l’épisode précédent ; est-ce que le fameux PPC ne serait-il pas spot ?
-On a notre tableau individuel de chien à remplir et notre niche à gérer
-Il y a une prise d’actions bloquante. Aussi la prise des chiens n’est pas à sous estimer. Je me vois parfois repousser la validation/la prise de l’action 1 pour choper un chien avec plus d’emplacements ou bien des chiffres différents de mes chiens actuels
-La pose des dés à son importance par rapport à quel chien veut-on valider le plus vite. Certaines actions renforcent même son impact en nous demandant de faire des choix parmi un lot. Et on a même la niche qui est concernée.
-Enfin pas de points, c’est le premier qui valide ses 6 points
D’ailleurs j’affectionne particulièrement la variante sans laisse. Les ensembles prédéfinis d’actions font que certains tableaux de chiens, certaines gestions de la niche sont plus forts durant toute la partie.
Avec cette variante, tout est relancé à chaque « rechargement ». On peut essayer d’anticiper les futurs actions en faisant des choix de poses ou prises particuliers
Qui valide ses 6 chiens*