Introduction
Dans ce dossier, Cyrus, Kurts, Le Pionfesseur et Mad’ se penchent sur ce qu’est la mise en scène dans les jeux de société et les manières d’en créer.
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Retour sur les commentaires du dossier précédent
Le dossier précédent était consacré au « Futur du jeux de Société ». On en reparle rapidement, et vous pouvez consulter les commentaires relatifs à cet épisode ici.
Présentation du sujet
Nous tentons de vous expliquer de quoi nous allons parler, pourquoi nous en parlons et où nous tentons d’aller dans cette émission.
Mettre en scène une partie
En images et en vrac, les références citées dans cette partie de l’émission
Alice is missing

Meurtre à Sacinay

Hantise

Vienna Connection

Der Besuch der alten Dame

Les liaisons dangereuses 1960

Art

Monologues du Vagin

Cabochons d’Orléans

Mélodice
Quel/le metteur/metteuse en scène êtes vous ?

La mise en scène invisible : ce qui se passe autour de la table compte autant que le jeu
Dans cet épisode, Kurts s’éloigne un peu des pions et des cartes pour braquer les projecteurs sur tout ce qui entoure vraiment une partie de jeu. Les rires, les silences, les petites habitudes de groupe, les incidents imprévus — tout ce “hors-jeu” qui ne figure pas dans le livret de règles mais qui façonne nos souvenirs. C’est ce qu’il appelle la “mise en scène invisible” : l’ambiance, les gestes et les instants partagés qui transforment une simple partie en une expérience vivante et unique.
La mise en scène intrinsèque du jeu renforcée par le geste
Tout matériel peut être le lieu d’une mise en scène. Du meeple de Carcassonne au dés de Las Vegas en passant par les figurines d’un dungeon crawler comme Descent.
Cyrus aurait pu nous proposer une chronique fleuve sur le sujet, mais il a choisi de mettre en évidence, la mise en scène que nous produisons par nos gestes sur des éléments de la scène de jeu. Et plus précisément, ces gestes qui ne sont pas dictés par les règles et qui créent une mise en scène dans le jeu et permettent d’en renforcer certains aspects tels que l’immersion, l’intimidation et le suspense.
La mise en scène par le game design
Le Pionfesseur nous parle d’une forme de mise en scène qui serait propre au Game Design lui-même.

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Une part de mise en scène de la part de la personne qui explique le jeu peut se trouver dans les points sur lesquels elle insiste
– points de règle
– tonalité qu’elle souhaite donner à la partie : +/- sérieux ou cool, le rythme, on laisse bien les autres jouer/parler ou pas.
Bien sûr, c’est +/- respecté suivant la population qui joue: coucou les alphas qui monopolisent la parole et expliquent aux autres quoi faire en coop «pour l’efficacité ».
La manière de montrer le score (piste ou jetons), ce n’est pas qu’esthétique, ça change aussi le gameplay.
– Sur la piste, on voit clairement le classement à tout moment
+ Avec les jetons, c’est moins évident.
Ça peut inciter à compter, mais c’est pénible et peut être mal vu selon l’ambiance de la table.
Quelqu’un peut m’expliquer l’intérêt de cette manière de montrer le score?
Il y a aussi des jeux où c’est caché, partiellement où totalement.
– on peut aussi écrire le score sur du papier ou une application
Qu’on affiche à tous comme en sport, ou pas.
Si tu sais que t’es 1er avec 10 points d’avance, qu’il reste 1 tour qui rapporte max 5 points, tu ne vas prendre le risque de perdre des points.
Si tu penses avoir un peu d’avance mais sans savoir combien, tu joues différemment.
Le « score effect » bien connu en sport.
Je vais bien, et je tiens à dire que je ne regrette rien, et je porte avec fierté cette (trop petite) cicatrice !
Pour Space team pas besoin de public pour jouer… Mais il y de quoi surprendre des spectateurs inopinés. Je me souviens d’une partie dans un aéroport pour tuer le temps lors d’un retard d’embarquement… Mais j’ai vécu la même chose quand nous jouions à Bohnansa à 5 dans une salle de embarquement !
Merci pour ce dossier !
Je ne crois pas que cet exemple ait été cité mais l’effet créé par une piste de scoring courte et circulaire (ou cyclique) fait son effet je trouve. Quand t’es aux fraises, tu en viens à te fixer juste comme objectif de ne pas te faire doubler sur cette piste par le 1er. En tout cas perso je me raccroche à ça pour rester dans la partie.
Ou alors, dans le même esprit, tu essayes d’atteindre un chiffre symbolique sur la piste (genre 100 points) car tu vois que tu n’en es plus très loin. Tu sors de la compétition avec les autres que tu sais perdue mais tu cherches à sauver ton honneur et atteindre un score à 3 chiffres. La question sans réponse est : est-ce que le game designer a pensé à cet effet dans l’équilibrage du jeu pour que la symbolique des 100 points signifie au joueur un truc du genre : bravo, tu maîtrises bien ce jeu mais désolé, tes adversaires étaient beaucoup plus forts aujourd’hui mais soit fier ? En tout cas, cette mise en scène marche avec moi, tant mieux, la frustration n’en ait que moins grande en cas de défaite!
Petite correction à la chronique du Pionfesseur, il n’y a pas de piste de score dans GWT ;-). Mais tous les points grappillés ici ou là sont visibles, sauf les vaches et les objectifs qui le sont par intermittence (quand on les achète et quand on les joue). Trop envie de tester en comptant les scores en direct désormais, je n’y avais jamais pensé ! La fonction existe sur BGA mais j’ai trouvé ça fade, j’aime pas. A tester IRL.
Pour compléter le parallèle avec la musique du début de l’émission, on distingue « l’interprétation » de la « mise en scène ». L’interprétation c’est la liberté prise par les artistes dans la manière de jouer mais tout en respectant la partition (équivalent du livret de règles). Alors que la mise en scène, c’est tout le « folklore » autour : exemple du musicien type pianiste ou clarinettiste qui fait des va-et-vient d’avant en arrière pour tenter de montrer au public qu’il est à fond dedans et donc renforcer les émotions transmises au public. L’orchestre qui se lève à l’arrivée du chef, le serrage de main du 1er violon, l’applaudissement des chorus de jazz sans attendre la fin du morceau, ne pas applaudir entre 2 mouvements… C’est-à-dire que le public est partie prenante de la mise en scène (par ses applaudissements/cris/briquets allumés par exemple), pas autant que les joueurs certes mais il peut faire ce qu’il faut et renforcer l’émulation. Dans le sport, ce sont les supporters et les commentateurs, une mise en scène globale règne ainsi dans le stade. Dans le jds, des observateurs extérieurs peuvent commenter la partie ou encore, dans les jeux à élimination, les éliminés peuvent continuer à créer de la mise en scène (genre tu fais des bruits de chouette à Loup-Garous ou ne serait-ce que rire de certaines situations, rires communicatifs).
Dossier très intéressant… Qu’il faut écouter plusieurs fois pour en faire le tour.
Bonjour la Proxi-team,
Comme j’aime bien les anecdotes personnelles, je vais en partagé deux raccord avec les chroniques de Mad’ et Kurts.
J’ai eu l’occasion d’assister involontairement, il y a quelques mois, à une partie de Captain Sonar à 8 joueurs.
La partie était tellement animée (et bruyante), qu’il était devenu parfaitement impossible de se concentrer, attiré et amusé par la curiosité de cette partie.
Mon plateau de Kauri était bien fade à ce moment là.
La seconde anecdote concerne une partie de The Mind.
Découverte pour mon paternel, qui étonnamment n’avais pas eu de difficulté à comprendre les règles (ce qui n’est pas courant).
Nous étions au niveau 5, la manche se déroula sans anicroche, il avait joué 2 cartes jusqu’à présent.
Alors que l’on pose la carte 92, il ne reste plus qu’un joueur avec 1 carte et mon père 3.
Et là une tempo de fou.
Finalement le joueur craque et pose 98….
Tout le monde regarde mon père qui reste muet, et alors que je m’apprête a annoncé que l’on a fait forcément une erreur, il pose ses trois cartes pour former 128.
Il est difficile de retranscrire par écris la sensation, entre la tempo interminable et la tension de fin de manche.
Son sérieux et son assurance avec ses trois cartes en mains, et la pose des trois cartes comme un joueur de poker qui révèle une quinte flush.
C’était mémorable, tout dans son comportement était directement lié à la mise en scène de cette résolution.
Jamais 2 sans 3, j’en donnerai donc une autre.
Je ne sais plus à quel moment vous évoquiez les techniques de mise en scène des joueurs dans le but d’amener de la tension dans un jeu.
Voici deux techniques à Magic que j’utilise souvent en non-compétitif.
Je joue essentiellement contrôle.
J’aime empiler ma main face caché devant moi, et révéler les contre-sorts sans regarder ma main. L’objectif est d’augmenter sa tension lorsqu’il compte jouer une carte, et qu’il est le sentiment que je n’ai que des contre-sort en main
A l’inverse contre un jeu contrôle, si je souhaite jouer plusieurs cartes dans ma phase, je vais mettre en réserve de mana l’ensemble des couts des cartes que je souhaite jouer, voir parfois plus. L’objectif étant de le faire hésiter sur l’utilisation d’un contre.
Merci pour votre dossier c’était super.
Trop bien ces anecdotes, j’adore car c’est vraiment ça qui souligne toute la puissance esthétique du jeu de société à mon sens (relativement à d’autres arts).
Je retiens tes techniques de bluff et d’intimidation à Magic, ça me rapelle une légende urbaine qui disait qu’un joueur en tournoi qui jouait contrôle avait une main pourrie plein de terrains et qu’en fin de tour, ayant plus de 7 cartes en main, il décide de défausser un contresort. Son adversaire se disant « ok il a donc 7 autres contres en main » aurait alors abandonné la partie.
héhé la défausse du counterspell sur la main pleine c’est du grand classique.
par contre jamais personne n’a abandonné face à moi la dessus.
ça a un nom ça, c’est la théorie du handicap
https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_du_handicap#Exemples
Super dossier encore qui ouvre sur des aspects auquel je ne réfléchis pas alors que ça a son intérêt.
Pour la soeur de Mad’, j’ai tout de suite pensé à une reprise des cowboys fringants où la personne se coupe la main avec un couteau à pain… à prioiri ça a mieux fini pour elle que dans la chanson :))
https://www.youtube.com/watch?v=jtDPRn58djo
Sinon, dans la chronique de Cyrus,
j’ai pensé aux gestes comme pour invoquer la chance, souffler sur les dés dans ses mains… c’est conjurer le mauvais sort (en tout cas, je le fais pour ça). A l’inverse, en famille, on s’est tapé des parties (peut-être basiquement de yam’s) à dire « oeil » pour invoquer le mauvais oeil sur les lancers adverses (et ça marche).
Pour Pionf,
je suis d’accord sur le fait que perdre des points plutôt que les gagner, ce n’est pas le même sentiment mais il faut que ça soit les mêmes valeurs alors (l’important c’est les valeurs).
Car imaginons à 2 joueurs, que nous avons chacun 10 points et des objectifs qui font perdre 2 et 5. Si on les réussi, on reste à 10 points chacun donc pas d’écarts alors que s’ils rapportaient 2 et 5 points (0 en les ratant), on serait à 12 et 5 points. Donc il faut que cela s’applique à tout le monde et pour les mêmes pertes.
Dossier hyper intéressant, et qui montre la dangerosité de notre passion ! (et des couteaux à pain, ayant moi-même une cicatrice due à cet objet du démon !)
Dans mon petit groupe de joueurs, la mise en scène est participative et spontanée.
C’est-à-dire que de nous même, nous allons souvent avoir de petites attentions liées au jeu prévu pour la soiree. T-shirt assorti au jeu du soir, quelques goodies liés au thème, ambiance assortie (bougies et lumières rougeâtres pour un thème lovecraftien)…
Et Melodice est effectivement notre ami !
Enfin, je me faisais la réflexion concernant les jeux asymétriques. Est ce que la méthode de scoring de ces jeux ne ferait pas partie de la mise en scène ?
En effet, quand on sait par exemple que la faction de l’adversaire a tendance à peu scorer en début de partie, mais se révèle redoutable dans les derniers tours, les autres joueurs qui ont cette donnée en tête vont rester méfiants, regarder ce faux retardataire du coin de l’œil, et stresser en arrivant aux derniers tours, sachant qu’à tout moment il va pouvoir révéler son jeu en mettant au gros coup de pression aux autres participants…
Je me suis posé la question de ce qui pouvait concilier vos 4 interventions, et il me semble que ce que que vous avez bien mis en lumière sans vraiment l’exprimer explicitement (voire parfois en essayant de contourner la question), c’est cet aspect partagé de la mise en scène entre l’auteur, l’éditeur et les joueurs dans le JdS.
Dans tous les autres arts, même si parfois la même personne peut assumer plusieurs rôles, même si le spectateur a sa part à jouer dans l’interprétation d’une oeuvre, on a quand même cette distinction assez nette entre
– auteur, scénariste, compositeur qui crée la matière de l’oeuvre
– metteur en scène, réalisateur, chef d’orchestre qui choisit sous quelle forme elle sera communiquée au public
– acteur, musicien qui interprète sous la direction des précédents
– spectateur qui « reçoit » l’oeuvre
et c’est comme si le JdS prenait un malin plaisir à brouiller ces lignes.
Ce flou existe dans d’autres arts (en BD la mise en scène est souvent partagée entre l’illustrateur et le scénariste si ce dernier fait des crayonnés ou donne des indications de mise en page), mais il est particulièrement exacerbé dans le jeu.
Petit exercice de prospective : est-ce que dans 400 ans on continuera d’éditer les jeux d’auteurs du XXè ou XXIè siècle comme on monte aujourd’hui des pièces de la renaissance ? À part de rares exceptions, et plutôt choisies sur la facilité d’en vendre des palettes que sur leurs mérites ludiques, j’en doute, mais je veux bien entendre votre avis là-dessus !